Publié le 9 octobre 2018
« Une bonne constitution ne peut suffire à faire le bonheur d’une nation. Une mauvaise peut suffire à faire son malheur » Guy Carcassonne professeur de droit public - PDF

« Une bonne constitution ne peut suffire à faire le bonheur d’une nation. Une mauvaise peut suffire à faire son malheur » Guy Carcassonne professeur de droit public En pleine guerre d’Algérie les institutions de la 4ème République étaient pour certains à bout de souffle. Suite au putsch militaire d’Alger du 13 mai 1958 le Général De Gaulle est rappelé au pouvoir et investi Président du Conseil (premier ministre) par le Président de la République René Coty. (rappelons que le dernier Président du Conseil de la 3ème république fut Philippe Pétain alors ambassadeur de la République Française en Espagne dirigée par le Général Franco). A partir du 4 juin 1958 il réunit un comité informel chargé de rédiger une ébauche de constitution. Le 15 juillet 1958, le comité consultatif constitutionnel est créé et reprend les travaux préparatoires. Dès le 15 aout 1958 l’avant-projet est examiné par le Conseil d'État.

Le 28 septembre 1958 le texte est adopté par voie de référendum, à une majorité de 79,25 % des voix, avec une abstention faible (15,6%). René Coty dernier président de la 4ème République la publie le 4 octobre 1958.

Son préambule renvoie à deux textes fondamentaux : la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789 et le Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 (la Charte de l'environnement de 2004 leur a, par la suite, été ajoutée). Ces textes, ainsi que les principes jurisprudentiels qu'ils ont permis de dégager, notamment les principes fondamentaux reconnus par les lois de la République issus du Préambule de 1946, forment, avec la Constitution stricto sensu, ce qu'il est convenu d'appeler le bloc de constitutionnalité et ce depuis que le Conseil constitutionnel a accordé, en 1971, valeur constitutionnelle au préambule de la Constitution.

Elle met en place un pouvoir exécutif fort en dotant le président de la république de pouvoirs personnels décisifs tel que le choix du premier ministre, le droit de dissolution de l’assemblée nationale ou le recours au référendum. Le passage du septennat au quinquennat a accentué ce pouvoir en faisant coïncider en fait la durée des mandats électifs. Les élections législatives suivent désormais de quelques semaines les élections présidentielles rendant quasiment impossible les épisodes de cohabitation (sauf cas de dissolution intempestive en cours de mandat ou décès ou démission du président de la République non suivi d’une dissolution de l’Assemblée Nationale). La France n’est donc ni un vrai régime parlementaire à l’européenne, ni un vrai régime présidentiel à l’américaine, mais un régime présidentialiste.

Cette particularité en fait une sorte de monarchie démocratique. Monarchie car le pouvoir d’un seul prédomine, et démocratique car il est élu, à l’issue d’élections libres et compétitives, pour une durée raisonnable, immédiatement rééligible une seule fois (seulement depuis 2008), et que l’État de droit, et la séparation des pouvoirs, composantes indispensable de la démocratie, y sont développés.

Après 24 révisions depuis sa promulgation il ne reste plus grand-chose du texte original. Seuls 30 articles sur 92 sont restés sans changement et 28 ont été ajoutés. Une 25ème révision est annoncée mais à peu de chance d’aboutir dans sa totalité. Certains points font consensus ( suppression de la présence de droit des anciens Présidents de la République au Conseil constitutionnel, amélioration des conditions de désignation des membres du Parquet, suppression de la Cour de justice de la République qui juge les ministres pour les actes accomplis dans l’exercice de leurs fonctions) alors que d’autres sont beaucoup plus problématiques (réduction du nombre des parlementaires, adoption d’une petite dose de proportionnelle aux élections législatives, limitation des mandats dans le temps).

Pour paraphraser ce que disait Churchill à propos de la démocratie, la Constitution de 1958 n’est-elle pas « le pire des systèmes à l’exclusion de tous les autres »