Publié le 16 octobre 2018
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Réformes des retraites : quelques pistes

La France est, avec l’Italie et la Grèce, l’un des pays européens qui consacre le plus de dépenses publiques au paiement des retraites (plus de 14% de son PIB). C’est aussi le pays où l’on dénombre le plus de régime différent selon les professions (secteur public, secteur privé, professions indépendantes, agriculteurs…soit 42 au total) et de strates (minimum vieillesse, régime de base, régimes complémentaires obligatoires et retraites supplémentaires facultatives. Le système est financé en répartition (les actifs actuels financent les retraités actuels) mais ne fonctionne pas de la même manière pour le régime de base et pour les régimes complémentaires.

La France rencontre depuis très longtemps des difficultés pour financer ses retraites. Le régime général a été presque constamment déficitaire de 1973 à 1998. Le déficit est réapparu en 2005 et s’est aggravé avec la crise économique de 2008. Le solde est redevenu positif depuis 2016. Les retraites et pré retraites ont longtemps servi d’arme contre le chômage avec la mise en place de la retraite à 60 ans et la multiplication des mesures de préretraites au moment des plans de restructuration industrielles qui ont marqué les années 80.

Sous la pression de l’Europe et la préparation de la monnaie unique entrainant la réduction des déficits publics la série des réformes commencent :

- 1993 : allongement progressif de 37,5 à 40 ans de la durée de cotisation nécessaire pour acquérir les droits à la retraite à taux plein, modification du calcul du salaire de référence (des 10 aux 25 meilleures années) et revalorisation des retraites sur l’évolution des prix plutôt que sur celle des salaires. Ces mesures ne concernent que le secteur privé.

- 2000 : création du Conseil d’orientation des retraites (COR) chargé de présenter régulièrement la situation démographique des différents régimes et les projections des dépenses à venir.

- 2003 : alignement des règles du secteur public sur celles du secteur privé à l'exception du salaire de référence qui reste les 6 derniers mois pour les fonctionnaires.

- 2010 : passage de l’âge de la retraite à 62 ans, allongement progressif de 40 à 43 ans de la durée de cotisation. Des freins sont mis aux départs précoces y compris pour les carrières longues

- 2015 : mise en place d’un compte pénibilité dont la mise en œuvre laisse à désirer.

Pour 2019 une révolution (dans le sens d’une transformation totale des structures) se prépare. Selon la première ébauche présentée aux organisations syndicales, tous les régimes seront fusionnés en un système universel par répartition et par points selon le principe d’équité et d’universalité. Le principe est simple : mêmes carrières, mêmes revenus, mêmes cotisations, mêmes retraites. Les primes des fonctionnaires seront intégralement prises en compte pour le calcul des droits à la retraite. Les agents qui ne touchent pas ou peu de primes risquent d’être pénalisés sur leur pension tandis que d’autres risquent de voir le montant de leurs cotisations monter en flèche (plus on perçoit de primes plus on cotise). Le montant de la retraite dépendant des points acquis et non de l’indice les inégalités observées selon les filières seront transposées sur les montants des pensions de retraite.

A côté du minimum vieillesse (a priori inchangé) les personnes ayant travaillé toute leur vie à temps partiel ou avec des revenus modestes pourront bénéficier d’un minimum de pension. L’âge minimum sera conservé à 62 ans. L’avenir des départs anticipés (régimes spéciaux, carrière active dans la fonction publique…) fera, sans nul doute, l’objet d’âpres débats.

Nous pouvons nous demander comment et dans quelle conditions se fera la bascule d’un système à l’autre. Pour les personnels qui seront à moins de cinq ans de la retraite rien ne changera (la loi entrera en application 5 ans après la date de sa promulgation soit vraisemblablement en 2025) mais pour les autres ? Selon le gouvernement ils basculeront immédiatement dans le nouveau système avec une conversion en points de leurs droits acquis. Pour les fonctionnaires le niveau de pension sera-t-il maintenu ? Mystère. Rappelons qu’il est impossible de connaitre le montant de primes perçues par un fonctionnaire durant sa carrière faute d’archives conservées par les administrations ou les services fiscaux. Gageons que comme lors de la suppression de la possibilité de départ anticipé pour les mères de trois enfants beaucoup précipiteront leur départ.

Enfin, nous sommes en France et avant même la mise en place d’un système universel certains, comme plusieurs caisses des travailleurs indépendants, font du lobbying afin de conserver une place autonome dans le système de retraite.

Pour le gouvernement quel sera la définition du terme universel ?