Publié le 25 février 2020
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Harcèlement, discrimination : à l’ENA aussi…

En amont de la présentation du rapport Thiriez sur la haute fonction publique, une vingtaine d’élèves (sur 81) de la promotion Molière (2018/2019) ont remis un rapport très critique concernant leur expérience à l’ENA. Cette remise est une tradition mais cette année il met en lumière des faits beaucoup plus sensibles.

Selon les élèves l’école ne prend pas en compte le problème du harcèlement des élèves en stage Les comportements, parfois abusifs, des maitres de stage ne sont pas pris en compte dans l’établissement de la note de stage et ne font, semble t il, l’objet d’aucune entrave de la part de l’école. Celle-ci persiste à leur envoyer des stagiaires même si la situation a été signalée et parfois même admis de façon informelle par la direction des stages.

Concernant le harcèlement sexiste, c’est semble-t-il encore pire. La première réaction de l’administration est le déni, puis si les faits ont fait l’objet de plusieurs signalements, la décision est de ne pas renvoyer d’élèves femmes mais de permettre l’affectation d’un élève homme! Belle illustration de la double peine.

Dans un souci d’apaisement, la direction de l’école a décidé de mettre en place à compter de début mars une cellule d’écoute indépendante composée de personnes étrangères à l’école afin de prévenir toutes les situations de harcèlement, de malaise au travail ou de mal-être.

Autre point mis en exergue par ce rapport les discriminations. En effet, l’âge et le type de concours initial prédétermineraient en grande partie le rang de classement. L’impression des élèves est que l’école discrimine par rapport à un idéal-type d’énarque plus qu’elle ne cherche à distinguer et à faire progresser des talents divers. L’ENA, selon eux, serait “très marquée par les codes de la préfectorale”.

En permettant d’évaluer essentiellement la capacité à synthétiser avec rapidité et assurance des données techniques ainsi que la capacité à deviner et à se conformer à des règles tacites et des attendus implicites, les épreuves du classement de sortie privilégient les élèves disposant d’un réseau leurs permettant d’obtenir des indications plus précises.

Le classement de sortie de la dernière promotion est révélateur. La promotion Molière compte 33 élèves issus du concours interne et 7 élèves issus du troisième concours, soit 40 élèves sur un total de 81 élèves (près de la moitié). Dans les 40 premières places, seuls 11 élèves sont issus de l’un de ces deux concours (soit la moitié de ce qu’ils devraient statistiquement représenter). A partir de la place 57 du classement, soit les 24 dernières places, on ne trouve plus un seul élève externe. Le rang moyen d’un interne ou d’un 3ème concours est 57ème, alors qu’un externe sort en moyenne au rang 27,5.

Cerise sur le gâteau, le classement de sortie de la promotion Molière vient d’être attaqué devant la justice. En cause pour l’une des épreuves: la présence d’un maître de stage comme président du jury. La direction de l’ENA ne dispose-t-elle pas de juristes compétents pour éviter ce type de bévue ou se moque-t-elle des textes législatifs, la question se pose….