Publié le 30 juin 2015
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Le monologue social (to be continued)

La dégradation du climat social s'accélère à la Mairie de Paris. Absence de concertation avec les représentants des personnels (.systématiquement mis devant le fait accompli.), projets entièrement ficelés dès l'origine et présentés aux syndicats pour la frime, multiplication des réunions empêchant tout travail sérieux. Emmanuel Grégoire s'étonne de l'extension du boycott des instances paritaires par les organisations syndicales. L'adjoint à la Maire de Paris chargé des ressources humaines devrait plutôt s'interroger sur leur pourquoi.

CHSCT de la DEVE boycotté par les syndicats, élus paritaires de la CAP des attachés d'administrations parisiennes quittant la salle avant la fin de la séance, CT Central interminable (.seuls deux points de l'ordre du jour sur cinq sont traités au bout de quatre heures de déclarations.), amendements acceptés au CSAP et retirés par l'Exécutif pour des considérations financières : décidément, rien ne va plus à la Ville !  D'autant plus que ces incidents récents (.listés de façon non exhaustive.) ne font que se multiplier depuis le début de l'année.

Emmanuel Grégoire s'en étonne et s'en inquiète. Pour l'adjoint à la Maire de Paris chargé des ressources humaines, la politique de boycott des instances paritaires menée de plus en plus fréquemment par les organisations syndicales n'est ni pertinente, ni efficace. Et M..Grégoire d'ajouter qu'il préférerait d'autres moyens d'actions.

Les causes réelles du boycott syndical

Pour sa part, le Syndicat UNSA des attachés des administrations parisiennes estime qu'au lieu de s'indigner à propos du phénomène (.qui va croissant.) du boycott des instances paritaires par les syndicats représentatifs de la Ville, l'adjoint à la Maire de Paris devrait plutôt s'interroger sur les causes dudit phénomène.

Pour notre organisation syndicale, celles-ci peuvent se résumer autour de deux points principaux :

>  l'inversion du processus normal communément appelé “.dialogue social.” où des propositions sont formulées par l'Exécutif puis ensuite discutées par les représentants des personnels. Dans la situation actuelle, la Municipalité présente aux syndicats des projets qu'elle qualifie immédiatement de «.non négociables.», et qui deviennent ainsi des communications pour information.

>  le décalage entre les premières déclarations d'Anne Hidalgo quelques jours après son élection devant les syndicats parisiens (.négociations en amont sur les projets de la Municipalité, implication des personnels dans les différentes réformes, etc..) et la politique menée en réalité quotidiennement sur le terrain. C'est le vieux thème de la seconde mandature de Bertrand Delanoë qui revient au devant de la scène : les agents de la Ville doivent penser dans un monde et vivre dans l'autre. D'où l'importance fondamentale que la Municipalité parisienne continue d'accorder à la communication.

Un spectre est souvent agité par un certain nombre de responsables de la Mairie lorsque les syndicalistes leur rappellent ce que devrait être un déroulement normal du dialogue social : celui de la cogestion. Le mot relève en réalité d'une conception primaire de la polémique, lorsque l'on sait que les différentes organisations représentatives des personnels ont toujours affirmé (.même avant 2001.) que leur rôle dans une démocratie est de formuler des propositions fondées sur leur expérience et les ressentis de leurs mandants – propositions que les élus pourront ou non retenir, à condition tout de même de les avoir entendues.

La négation de l'État de droit ?

Mais, au-delà des vicissitudes et des incidents picrocholiens actuels, n'existe-t-il pas deux problèmes fondamentaux – et éminemment politiques – qui se posent depuis déjà un certain nombre d'années à la Mairie de Paris :

>  la négation de l'État de droit : pour la Municipalité, seuls les élus issus du suffrage universel disposeraient d'un pouvoir légitime. Les autres instances, non élues par l'ensemble de la population parisienne, ne seraient alors que des corps intermédiaires devenant très vite des parasites. C'est oublier que la démocratie est forcément associée à l'État de droit qui confère à un certain nombre d'instances non issues  du suffrage universel (.médias, syndicats.) un rôle de contre-pouvoirs.

>  une conception particulière de la Gauche et de la Droite qui amènerait à penser que la Municipalité et les syndicats sont depuis 2001 dans le même camp et que la première a forcément la primauté sur les seconds du fait d'une plus grande légitimité issue du suffrage universel (.voir ci-dessus.). Les organisations syndicales se verraient alors cantonnées dans un rôle de figurants devant approuver la politique (.nécessairement bonne.) des élus et étant seulement autorisées à émettre ponctuellement et à la marge quelques remarques anodines.

Le dialogue social tomberait alors dans le monologue, où toute contradiction est interprétée comme une manifestation incongrue d'opposition inacceptable.

Photo  :  © Jakub Jirsak  –  Fotolia