Publié le 30 janvier 2012
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Les fonctionnaires et l’élection présidentielle

Dans le cadre de ses “60 engagements” pour l'élection du Président de la République, François Hollande formule de nombreuses propositions concernant le secteur public, telles (entre autres) que la fin de la RGPP, la suppression du futur conseiller territorial, la fin de la tarification à l'activité des hôpitaux publics et la création de nombreux postes. Le candidat socialiste promet d'autre part une large consultation avec les syndicats de la Fonction publique. Pendant ce temps, les politologues de Sciences-Po notent une percée du Front National chez les fonctionnaires.

Le projet de François Hollande pour le secteur public se décline autours des thèmes suivants :

> Stop à la RGPP ! S'il accède à l'Élysée, le candidat socialiste déclare qu' « un coup d'arrêt sera porté à la procédure de Révision générale des politiques publiques et à l'application mécanique du non-remplacement d'un fonctionnaire sur deux ».

> Les collectivités territoriales. François Hollande supprimera le conseiller territorial avant même sa mise en place prévue pour 2014. Un « pacte de confiance » sera conclu entre l'État et les collectivités pour garantir le niveau de leurs dotations. « Je réformerai la fiscalité locale en donnant plus d'autonomie aux communes, aux départements et aux régions, en contrepartie d'une plus grande responsabilité » assure l'ancien premier secrétaire du PS. « Une véritable péréquation sera mise en œuvre » ajoute-t-il.

> Hôpitaux = service public. S'il est élu Président de la République le 6 mai prochain, François Hollande promet de revenir sur la tarification à l'activité des hôpitaux publics « pour mettre fin à l'assimilation avec les établissements privés ». Il préconise par ailleurs la création de pôles de santé de proximité dans chaque territoire et fixera « un délai maximum d'une demi-heure pour accéder aux soins d'urgence ». Ce programme fait écho aux propositions de la Fédération hospitalière de France, qui suggère la mise en place d'un système de financement reconnaissant mieux la part des missions de service public des hôpitaux.

> Les créations de postes. 60.000 postes supplémentaires dans l'Éducation nationale seraient créés en cinq ans et un prérecrutement des professeurs serait instauré. 1.000 postes supplémentaires seraient également créés pour la justice, la police et l'armée. Pour François Hollande, ces créations de postes n'empêcheraient pas la réduction du déficit public à 3 % du PIB en 2013 et le retour à l'équilibre budgétaire en 2017, via la fin des « cadeaux fiscaux » et des « multiples niches fiscales ». Cette dernière réforme permettrait en effet, selon le candidat du PS, de dégager 29 milliards d'euros de recettes supplémentaires.

François Hollande précise également, s'il l'emporte, qu'une grande réforme fusionnerait l'impôt sur le revenu et la CSG dans le cadre d'un prélèvement simplifié sur le revenu dont une part serait affectée aux organismes de Sécurité Sociale. Les revenus du capital seraient imposés comme ceux du travail. Le statut public des entreprises détenues en majorité par l'État (EDF, SNCF, La Poste, etc.) serait maintenu et une « directive sur la protection des services publics » serait proposée au niveau de l'Union Européenne. Le candidat socialiste indique également que, s'il est élu Président de la République, il ouvrira avant la fin de l'année 2012 une concertation avec les syndicats de la Fonction publique « sur tous les sujets » : perspectives salariales, lutte contre la précarité, déroulement des carrières, nominations dans les emplois supérieurs de la FP.

Pendant ce temps, les politologues du Centre de recherches politiques de Sciences-Po (anciennement Centre d'études de la vie politique française, l'acronyme Cevipof ayant été maintenu) de la Fondation nationale des sciences politiques signalent dans une note intitulée “Le vote des fonctionnaires : cinq ans après la RGPP” une nette percée du Front National chez les fonctionnaires, à tel point que « si l'élection ne voyait voter que les seuls agents du secteur public, François Hollande affronterait  Marine Le Pen au second tour ».

Selon l'étude du Cevipof, au premier tour de la Présidentielle, Marine Le Pen ferait jeu égal avec Nicolas Sarkozy dans la Fonction publique d'État (15 %) et dans la Fonction publique hospitalière (18 %). Par contre, la candidate du Front National devancerait le Président sortant dans la Fonction publique territoriale (13 % contre 11 % à Nicolas Sarkozy) et obtiendrait 24 % dans les entreprises publiques. Dans tout le secteur public, François Hollande arrive cependant largement en tête.

Il est intéressant de noter que Marine Le Pen obtient un score très faible chez les enseignants (3 %) et les cadres A de la Fonction publique (4 %) mais obtient un bon résultat (18 %) dans la catégorie C de la Fonction publique et – surtout – bat tous les autres candidats chez les policiers et les militaires avec 34 % des intentions de vote (Nicolas Sarkozy n'obtenant que 27 %, François Bayrou 11 % et François Hollande 8 %).

Luc Rouban, directeur de recherche au CNRS et auteur de la note du Cevipof, remarque qu'en 2012, « les employés et les ouvriers du secteur public constituent le groupe électoral le plus attiré par le “ni-nisme” qui se traduit soit par l'abstention, soit par un vote d'extrême droite ». Luc Rouban souligne ainsi que l'attrait de la droite modérée s'est affaissé depuis 2007 dans toutes les catégories de fonctionnaires au profit de la gauche pour les plus diplômés et du Front National pour les moins diplômés.